Apporte-moi donc un grand verre de ce St Amour, mon amour,
Tandis que se pâment les rondes pommes en robe des champs !
Apporte donc tes bras par ici, mon chéri, pendant que j'allume le four !
Fais-moi donc sauter autour de ton cou pendant que le Gevrey Chambertin se chambre !
Redonne-moi donc une large pincée de ces brûlants baisers épicés,
Pendant que la côte se dore au soleil de notre cheminée !
Redonne-moi donc une large rasade de tes mains sur mes hanches,
Pendant que transpirent ensemble les petits oignons et le lard en tranches !
Viens donc par ici, mon ange, je crois bien que la cuisinière surchauffe un peu !
Ne crois-tu pas qu'il faudrait tenter quelque chose pour éviter que le festin n'attache ?
Viens donc par ici, mon lapin, je crois bien qu'il est temps de jeter un peu d'huile sur le feu !
Fais-moi donc rissoler sur le sel de ta bouche ; mettons-nous, mon cœur, avec ardeur à la tâche !
Fais-moi suer, mon aimé, je veux me couler avec délice dans les profondeurs de ton palais !
Fais-moi velouter, mon doux, je veux découvrir ce que sous ton couvercle, tu mijotes !
Étouffons-nous, caramélisons-nous pour mieux exhaler de nos saveurs, les plus raffinées !
Écumons-nous, étendons-nous, régalons-nous de ces agapes dignes de la crème des hôtes !
Mais sache, mon mignon mitron, que s'il te prenait jamais l'idée de me rendre ton tablier,
Je jure sur la tête de Babette de ne plus jamais te cuisiner,
Ni même te fouetter et encore moins de te lier…
©Véronique Marie Aubry - Extrait du livre Inconvenantes dérailleries - Quelques rondelles de prose
Comments